L’armée
en Suisse (1914-1918) :
forces
et difficultés.
Antoine
Schülé, historien
Introduction
La
Suisse est un pays neutre et, de ce fait, il est rare d’entendre sa voix à
l’étranger lors de débats historiques sur la Grande Guerre 1914-1918. Ainsi, il
m’a paru utile de s’intéresser à ce pays voisin, au milieu de pays en guerre,
qui a connu une mobilisation de ses troupes sans devoir verser le sang sur son
territoire.
Cependant, il ne nous est pas possible
de commencer ce sujet sans évoquer les 14 000 engagés volontaires suisses pour
la France. Pour Elle, 8 000 d’entre eux ont perdu la vie et 1 000 hommes sont
revenus gravement mutilés[1].
Dès l’automne 1916, le 1er Régiment de marche de la Légion étrangère
était essentiellement constitué de suisses. Sur l’Aisne, en Champagne, dans la
Somme, à Verdun et dans les Vosges, leur engagement jusqu’au dernier sacrifice
et leur capacité à se battre ont été démontrés.
La
mémoire retient tout particulièrement la bataille de Villers-Bretonneux où les Suisses
ont repoussé cinq contre-attaques, au prix de 800 morts et de 1 500 blessés.
Les actes courageux n’ont pas manqué et, parmi la longue liste des morts
héroïques au combat, la postérité devrait retenir des noms comme ceux du
lieutenant-colonel Rollet, des capitaines de Tscharner (d’Aubonne), et Junod,
des lieutenants Doxat (de Champvent) et Blanc (de Vevey), du caporal
mitrailleur Fracheboud (de Gruyères) ou du soldat mitrailleur Perrotet (de
Colombier). Il est à signaler que de nombreux engagés sont très jeunes.
L’exemple le plus frappant est celui du mitrailleur Vaucher, de
Neuchâtel : âgé de seize ans, il a continué à servir sa mitrailleuse alors
qu’il avait l’œil arraché par une balle ! Il est un nom qui est connu, en
tout cas sous son pseudonyme : celui de Frédéric Sauser, c’est-à-dire
Blaise Cendrars. Il a perdu une main sur le champ de bataille. Cet écrivain, à
l’œuvre abondante, a composé deux récits de guerre saisissants : « La main coupée » et « J’ai tué ». Il ne possède pas une
mémoire historique mais il voit et il interprète les faits avec la sensibilité
du poète : il sait rendre la flamme intérieure qui anime l’homme dans la
lutte. Il est critique vis-à-vis des artistes qui se sont mis à l’abri durant
le conflit et cette citation justifie son engagement : « Comme si la place d’un poète n’était pas
parmi les hommes, ses frères, quand cela va mal et quand tout croule,
l’humanité, la civilisation et le reste. »[2]
Avec cette communication, nous vous
proposons une rapide et large esquisse des principaux thèmes que notre
historiographie a retenus quant à notre tradition de neutralité armée. Il
apparaît différentes forces et difficultés à l’intérieur d’une confédération
pluriethnique, pluriculturelle comme plurilinguistique, qualificatifs qui sont
les meilleurs gages d’une neutralité réelle.
La
neutralité
La
neutralité est sans contestation possible le thème privilégié autant par les
diplomates et les politiques que les militaires et les économistes. Jusqu’à nos
jours encore, les historiens confrontent les faits non pas à la neutralité mais
à des conceptions de neutralité : l’ennui est qu’elles sont fort
diverses ; une grande confusion règne même au sein de la population ;
la tendance actuelle des « Intellectuels »
(enfin ceux qui se prétendent comme tels) est d’entretenir un sentiment de
culpabilité pour le simple fait de vouloir rester neutre ! Les autorités
et les peuples suisses ont eu une confiance très forte en ce principe.
La neutralité a été idéalisée à un tel
point en temps de paix que rares ont été ceux à en prévoir les difficultés en
temps de guerre. Elle avait avant tout une valeur juridique qui rassurait
chacun. Les traités internationaux, comme ceux de La Haye, reconnaissaient la
neutralité et le commerce des neutres en temps de guerre. Les militaires[3],
depuis Dufour[4]
déjà, exprimaient une caractéristique dont l’importance s’est révélée à
l’usage : la neutralité n’est pas une éthique comme le croit une grande
part de l’opinion publique mais elle est avant tout un moyen en faveur de
l’indépendance du pays. Des écrivains[5]
sérieux se sont exprimés en nos trois langues sur la neutralité mais ils
restent bien souvent oubliés des historiens alors que leurs messages
mériteraient autre chose que le silence qu’ils connaissent. La perspective
économique a trop occulté le véritable débat. Les littéraires ont souligné la
nécessité pour la Suisse de conserver sa neutralité au milieu des nations en
guerre mais, en même temps, ils ont déclaré que la neutralité morale n’existe
pas.
Guerre
économique
La
Suisse a pu mobiliser ses troupes sans difficulté car l’éclatement de la guerre
n’a pas été une surprise. C’est la longueur du conflit qui a surpris chacun. La
guerre a duré cinq fois plus longtemps que les diplomates l’avait estimée et
huit fois plus longtemps que l’Etat-Major Général de l’armée l’avait évaluée.
Ceci explique que la Suisse n’était pas prête d’un point de vue
économique : les réserves étaient insuffisantes.
Depuis
les années 1880, la Confédération helvétique connaissait un prodigieux essor
économique. La vie de ses industries dépendait cependant de ses exportations.
De plus, elle se trouvait dépendante des denrées alimentaires et des matières
premières en provenance de l’étranger[6].
En 1914, la majeure partie du blé venait de la Russie via l’Allemagne, et
d’outre-mer, via la France. Le charbon et le fer provenaient d’Allemagne. A la
fin du conflit, notre approvisionnement en charbon, sucre, coton et céréales
dépendait des Etats-Unis. Les exportations suisses étaient du bois, des
baraquements, du ciment, des munitions, des produits de technologie de pointe
et des pièces d’habillement. La Suisse est un pays qui ne peut pas vivre en
autarcie et par conséquent sa survie dépendait et dépendra toujours des
relations qu’elle peut avoir avec le monde. Sans accès à la mer et quoique
possédant une flotte marchande, il faut encore que les voisins directs lui
accordent le transit des biens qui lui sont de première nécessité.
Inévitablement, notre pays a été dans l’obligation de participer aux efforts de
guerre des belligérants, et de tous les belligérants, dans la mesure où ceux-ci
nous garantissaient des importations vitales.
Un faux procès facile à
faire et dont quelques uns se font gloire avec les honneurs de la presse à
sensation, est d’accuser les autorités gouvernementales d’avoir fait pencher la
balance plus pour tel pays que tel autre. C’est oublier que des relations
commerciales existaient avant 1914 dans des proportions déjà variables. Une
fois que le ou les vainqueurs sont connus, il est un chantage, qu’il vous
convient de qualifier, de vouloir culpabiliser un peuple d’avoir eu des
échanges commerciaux partiels avec le vaincu.
La difficulté
essentielle à laquelle les autorités de cette époque ont été confrontées, a été
d’apprécier le degré de compatibilité entre la politique commerciale extérieure
et la politique générale de neutralité. L’Etat-Major de l’armée a été parmi les
premiers à souligner et à s’alarmer des
limites de nos réserves alimentaires. Lorsque notre dépendance économique à
l’égard de l’étranger a éclaté au grand jour, les responsables de l’économie
suisse ont pris des mesures parfois isolées et sans grande cohérence :
savoir prévoir exige une capacité de prospective qui n’est pas donnée à tous et
qui ne se cultive pas dans les discours politiques creux.
Cette
situation a été inévitablement exploitée par quelques profiteurs de guerre
comme il y en avait dans tous les pays qui ont connu le marché noir. Certains
secteurs de l’économie ont effectué des bénéfices exceptionnels[7]
alors que d’autres ont été complètement paralysés. Les industries et la
paysannerie ont pu résister à une crise financière qui a touché surtout la
masse des ouvriers et des salariés des villes. La crise sociale due à des
salaires insuffisants et à la hausse des coûts avait encore augmenté dans les
années 1915 à 1918. M. Ernest Bovet[8]
qui n’était pas socialiste (au sens d’appartenance à un parti politique), a pu
dire avec raison : « Nous avons
la démocratie politique mais il nous manque la démocratie sociale. ».
Notre sécurité
économique était assurée par les dispositions de droit, établies à La Haye, en
faveur du commerce des neutres. La Suisse a pu apprécier la valeur des traités
internationaux aux yeux des pays en guerre. Lorsque les pays combattants
engageaient une guerre totale, les règles de droit leur étaient devenues
accessoires. Un véritable troc s’établit, ce qui n’excluait pas des prises de
bénéfice par ceux qui le pouvaient. Pour assurer l’approvisionnement de la
Suisse, le Conseil Fédéral[9]
a dû accepter une restriction de sa souveraineté, sous la forme de contrôle de
ses importations. La «Société Suisse de
Surveillance » a été crée en faveur des forces de l’Entente. Son sigle
abrégé était la SSS que certains traduisaient avec humour par «Société de souveraineté suspendue ».
En contrepartie, l’Allemagne a demandé la création de la «Schweizerische Treuhandstelle »[10].
Ce contrôle allemand a nécessité la mise à disposition par le général Wille
d’une trentaine d’officiers et non de civils. La Confédération avait la
capacité industrielle à répondre aux commandes de première nécessité des états
en conflit. Durant la guerre, il n’y a pas de faveur gratuite. La Suisse a été
ravitaillée en matières premières pour elle et son fournisseur dans la mesure
où ce dernier lui assurait en plus des denrées alimentaires en échange de
produits manufacturés.
Cette situation démontre
que la Suisse pouvait prétendre à une neutralité militaire, territoriale,
politique et diplomatique. Par contre, la neutralité économique ne dépendait
pas d’elle. Celle-ci était le résultat du bon vouloir des pays voisins en
guerre… Ce constat peut paraître choquant pour la fierté nationale mais il
permet d’être réaliste sans jouer aux «flagellants »
de l’histoire contemporaine[11].
Les blocus économiques des pays belligérants ne pouvaient pas être sans
conséquences directes pour notre pays. Finalement, notre force n’a pas été dans
notre droit à la neutralité mais dans l’utilité d’avoir un pays neutre :
c’est une réalité de notre histoire qui ne peut pas s’occulter. L’utilité d’un
pays neutre comme la Suisse a dépendu de sa capacité à se défendre. Dans la
mesure où nous étions capables de fournir une défense armée crédible, notre
territoire offrait :
1. un
raccourcissement des fronts,
2. un lieu
d’internement pour les prisonniers de guerre,
3. un lieu de
rencontres informelles pour l’ensemble des belligérants.
Plusieurs approches historiques ont
cru valoriser leurs recherches en niant le rôle de l’armée : l’histoire
officielle ne voulait retenir que la prépondérance du politique, la «nouvelle »[12]
histoire ne voulait considérer que le poids économique. Les militaires ont eu
une approche globale, peu connue, où cinq forces travaillaient ensemble :
le moral de la population, les mesures politiques adaptées, les réserves
économiques, les relations informelles avec tous les belligérants et une armée
crédible. Il est regrettable que le champ historique ait été envahi par des
querelles de partis : les partisans d’une suppression ou d’une réduction
massive de l’armée ont voulu privilégier le seul économique pour réduire le
rôle de l’armée à la portion congrue. Une des forces de la Suisse a bien été de
pouvoir disposer d’une structure industrielle de qualité mais ne voir que
celle-ci serait adopter des œillères. Ignorer l’effet dissuasif de la
mobilisation des troupes helvétiques et l’importance qu’y attachaient les Etats
voisins en guerre est une omission partisane.
Opinions
publiques ou le «fossé » entre Romands et Alémaniques.
Durant
tout le conflit mais bien avant et encore de nos jours, il y a eu et il y a la
différence entre les cantons romands, de langue française, et les cantons
alémaniques, de langue allemande. Les cantons de langue italienne sont plus
proches des romands avec des nuances toutefois. Cette différence ne doit pas
être perçue comme une opposition systématique ainsi que certains le
caricaturent rapidement. Le passé historique a créé une complémentarité entre
deux cultures fondamentalement différentes.
Les Alémaniques ont admiré le
développement technique de l’Allemagne, comme son économie et l’affirmation de
son influence dans le monde. Cette admiration était la même que celle des
Romands pour l’Angleterre, durant le 19e siècle. Pour ceux qui connaissent
l’Allemagne et son histoire, il est un aspect qu’il faut préciser : les
Alémaniques ne se sentaient pas proches de l’Allemagne prussienne. Ils
s’inspiraient de la culture allemande qui caractérise l’Allemagne du Sud.
L’université de Bâle (ville très européenne en raison de son passé) comptait
vingt-six professeurs allemands sur cinquante. Nos écrivains de langue
allemande étaient publiés en Allemagne. Cela n’a pas empêché l’écrivain, le
plus connu à l’époque qui nous intéresse, Carl Spitteler[13]
à prendre parti de façon critique contre la guerre menée par l’Allemagne. Des
liens de sang unissaient l’Allemagne et la Suisse de la même façon que la
France et la Suisse : ceci n’impliquait pas une adhésion politique à un
pays plutôt qu’à un autre. Cette situation particulière de la Confédération
était donc tout à la fois une force et une difficulté.
A
cette époque, la Suisse était à majorité protestante et Guillaume II passait
pour le protecteur, certains disaient même le «pape », du protestantisme.
Il a inauguré le mur de la Réforme à Genève. En plus de liens familiaux avec
von Bismarck[14],
le général de l’armée suisse, Ulrich Wille, avait suivi une formation militaire
de base au sein de l’armée allemande. Il souhaitait la victoire allemande et ne
s’en cachait pas, il était un admirateur des méthodes militaires prussiennes.
Cependant, il serait faux de laisser entendre comme le font Nicolas Meienberg[15]
et d’autres à sa suite qu’il ne se serait pas opposé à l’Allemagne, en cas
d’une invasion de notre territoire par celle-ci. Nombreux étaient les officiers
supérieurs suisses à faire leurs vœux pour la victoire de la France. Il serait
tout aussi faux de les accuser à avoir été prêts à trahir leur pays en faveur
de la France. Le chef de l’Etat-Major Général, Sprecher von Bernegg, était pour
sa part un austrophile par tradition familiale. Après consultation des pièces
se trouvant aux Archives fédérales, il est possible d’affirmer qu’il a effectué
son travail en toute impartialité en fonction des différentes menaces
possibles. La situation militaire a évolué au cours du conflit et a commandé de
nouveaux plans : il a pris les mesures idoines, sans état d’âme. Le
principe était simple : l’armée suisse s’allierait, avec l’approbation du
Conseil Fédéral, à l’ennemi du pays qui violerait son territoire. Des
historiens et surtout des politiques lui ont reproché la mobilisation de
troupes au Tessin en 1914. Militairement, son action était justifiée et avait
un poids politique certain. Cela a correspondu à une pratique constante de
dissuasion à l’égard de tous les belligérants. Il ne l’aurait pas fait que cela
aurait été une mise en doute de notre volonté de défense.
Parmi
les étudiants romands, nombreux étaient ceux à avoir accompli des études en
Allemagne comme en France. Ils avaient des positions critiques à l’égard des
deux pays : trop souvent, une meilleure compréhension des caractéristiques
de l’un ou l’autre pays a été pris pour une forme d’adhésion, c’était une
conclusion qui ne peut pas se généraliser. Pour notre part, nous pensons qu’il
y avait en fait un rejet majoritaire de l’exclusivisme d’une nation ou l’autre.
Le débat a été très souvent faussé en raison de la confusion des polémiques de
presse et des opinions publiques : la presse helvétique n’a pas échappé,
bien au contraire, à la guerre de propagande qui se livrait. Cette dernière a
connu une forme plus subtile parfois mais elle est indéniable[16].
Les belligérants tenaient à défendre leurs options dans la presse neutre pour
créditer leurs choix. Une étude[17]
objective et globale de la presse suisse à ce moment fait encore défaut.
La
francophilie a pris un nouveau souffle en Suisse romande lors de l’attaque
allemande contre la Belgique. Cette action militaire a eu le même impact sur
les foules que la guerre menée par les Anglais contre les Boers en Afrique du
Sud : une comparaison utile serait à faire entre les relations de presse
de ces deux événements. Cette francophilie était pourtant nuancée et pas
générale pour des raisons qui sont peu souvent relatées. Par exemple, de
vieilles familles patriciennes genevoises, donc de langue et parfois d’origine
française, se méfiaient de la France. Pour elles, la France symbolisait tout à
la fois la Révolution, le catholicisme et l’encerclement.
Pour
clore ce chapitre, il faut préciser qu’en 1918, le socialisme syndicaliste est
inspiré et dirigé par plusieurs allemands d’origine avec des enfants de bonnes
familles bourgeoises de Berne[18].
Comme quoi, rien n’est aussi simple que certains ont voulu nous le faire
croire. Le fameux «fossé »[19]
créé par la langue n’apporte pas une mise en perspective aussi prépondérante
que des historiens l’ont cru.
Les
aspects militaires.
Avec
son armée de milice, la Suisse a dû prendre ses marques dans la grande guerre
voulue et faite par les autres. La mobilisation, décidée par le Conseil Fédéral,
s’est déroulée le 3 août 1914, sans aucune difficulté et selon la planification
prévue par le chef de l’Etat-Major Général, Sprecher von Bernegg. Le 1er
août 1914, des détachements de protection à la frontière étaient déjà sous les
armes. La mobilisation représentait 250 000 hommes dans les formations de
combat[20]
et 200 000 hommes dans les services auxiliaires. L’armée disposait de 400
canons de campagne. 4 200 hommes sont morts et, dans ce nombre, les 2 000 morts
de la grippe espagnole sont inclus.
Hostile
aux plans tout faits et préparés, le général Wille n’adoptait pas un plan de
guerre en fonction d’une seule menace préétablie. Les secteurs les plus menacés
étaient ceux du front nord-ouest et d’autres cas possibles furent étudiés,
spécialement sous la direction de Sprecher. Refusant ce qu’il considérait comme
de la paperasse, il privilégiait l’instruction. Il s’engagea totalement pour
que l’officier soit un formateur de soldat. Sa préoccupation première était de
pouvoir disposer d’une troupe apte à toutes les exigences de la guerre. Il fut
souvent caricaturé en raison du «drill » à la prussienne dont on lui a
attribué faussement la paternité pour l’armée suisse. En réalité, plusieurs de
ses écrits marquent sa profonde désapprobation[21]
de cette pratique mal comprise et mal appliquée. Il voulait un chef de troupe
capable de se libérer d’un formalisme excessif pour privilégier la pratique
tout en respectant la valeur humaine du soldat. Ses adversaires s’accordent
pour reconnaître qu’en peu de temps il était arrivé en matière d’instruction à
un haut degré de technicité. Son caractère était très différent de celui de
Sprecher : ces deux fortes personnalités se sont clairement partagé les
fonctions afin d’éviter toute source de conflit de compétences. Ainsi la direction
de l’armée, sous la conduite de Sprecher, actualisait régulièrement les plans
minutieux de position d’armée pouvant permettre des engagements dans toutes les
directions utiles. Le principe de défense d’un pays neutre consiste à démontrer
sa capacité à pouvoir réagir contre n’importe quel agresseur et d’où qu’il
vienne.
Pour
être véritablement opérationnelle, la troupe a eu besoin d’un mois et demi. Il
a fallu 15 jours pour la préparation individuelle du soldat (tir et marche), 30
jours pour une conduite harmonieuse du bataillon et 45 jours pour que règne un
véritable esprit interarmes dans une division de cette époque.
Suivant
les menaces militaires et les nécessités de la vie nationale, les effectifs des
troupes mobilisées ont évolué en dents de scie. Cela occasionnait un roulement
d’hommes entre les secteurs de service actif et l’arrière. Pour le moral de la
troupe, ce roulement était souvent une rupture brutale : la différence des
mentalités entre ceux qui sont sous les drapeaux et ceux de l’arrière était
très sensible pour les soldats comme pour les officiers. La durée du conflit et
la non-confrontation avec un adversaire ont rendu pénibles les obligations de
service. Les hommes se sentaient plus nécessaires à leur famille et à leur
profession : les interrogations se faisaient toujours plus nombreuses
quant à l’utilité du maintien des hommes en armes. Les ennemis les plus
difficiles à vaincre en service ont été la fatigue et l’ennui. L’initiation et
la pratique de nouvelles méthodes de combat ont été ainsi les bienvenus. Les
soldats de l’Elite[22]
ont effectué de 1914 à 1918, en moyenne, 550 à 600 jours de service actif. La
cavalerie en effectué 400 à 450. Ceux de la Landwehr[23]
ont servi en moyenne 250 jours.
La
mobilisation avec y compris le ravitaillement de la population civile a coûté 2
milliards de francs-or. Un impôt spécial, l’impôt fédéral direct, a rapporté
700 millions durant le conflit. Depuis, les autorités fédérales ont omis de le
supprimer si bien qu’il se paye encore. Mille violations de frontière se sont
produites : moitié par l’Entente, un quart par les Centraux et un quart
d’origine inconnue. Ce nombre peut paraître élevé mais ce sont les violations
de l’espace aérien qui l’expliquent. La neutralité de l’espace aérien avait été
proclamée par les politiques sans donner à l’armée les moyens de la défendre :
leur finesse de jugement a été ainsi révélée.
L’originalité
de la défense suisse a été sans aucun doute ce qu’il convient d’appeler «la diplomatie militaire parallèle ».
Ce sujet fait l’objet de débats très controversés encore actuellement et irrite
les politiciens. Seuls quelques membres du Conseil Fédéral étaient informés de
ces contacts informels militaires. Avec l’ensemble des états-majors étrangers,
il existait de véritables liens d’amitié et de sympathie. Les informations
circulaient et une confrontation de celles-ci pouvait en assurer la
crédibilité. Des conventions militaires ont pu être officialisées. Le résultat
le plus tangible pour la troupe, pour l’économie et pour le budget militaire a
été de pouvoir mobiliser ou démobiliser les hommes en prenant le moins de
risque possible.
Accords
militaires franco-suisses.
La
menace militaire de janvier 1917 a obligé le général Ulrich Wille à mettre sur
pied trois divisions. Il l’a fait alors que Ludendorff démentait toute idée
d’invasion de sa part. En mars 1917, une convention est signée entre la Suisse
et la France. Elle prévoyait une action coordonnée entre le «groupe d’armées
d’Helvétie », sous le commandement de Foch, et les troupes suisses.
Sommairement, le dispositif planifiait un repli devant l’envahisseur allemand
pour occuper de positions militairement favorables à l’engagement des alliés.
Des renforts anglais et italiens étaient aussi envisagés. Dépêché par Foch,
Weygand était venu régler les détails de l’opération. Malgré ses sympathies
pour les puissances centrales, Wille a
démontré que, face à un danger probable, il était capable de s’engager
dans un dispositif militaire allié, à un niveau opérationnel.
L’affaire
des colonels.
Elle
porte pour nom les grades des deux colonels officiers de renseignement :
les colonels Egli et de Wattenwyl. Elle a fait grand bruit en fin de l’année
1915 et en février 1916. Cette affaire aurait pu mettre en danger les autorités
aussi bien politiques que militaires.
Un cryptologue du nom de Langie
travaillait pour les services de renseignement suisse. Il s’était aperçu que
son décryptement des messages codés russes avait été fourni à l’Allemagne.
Cette information fut confiée par Langie à un journaliste M. Bonnard qui lui
suggéra d’en informer le chef du Département militaire fédéral[24],
M. Decoppet. Le Conseil fédéral, une fois informé, et le général Wille
tentèrent d’étouffer l’affaire discrètement. C’était sans compter la presse qui
s’en empara. A cette occasion, la population apprit que les bulletins de
l’Etat-Major suisse étaient communiqués au major allemand von Bismarck et à
l’autrichien von Einem. Il s’agissait d’un bulletin à version réduite. Par
manque de moyens financiers, les services de renseignement suisses ont préféré
opérer un troc d’informations. Cette affaire échauffa les esprits dans un
contexte politique délicat. Dans quelques grandes villes, des démonstrations
antiallemandes éclatèrent. Les réactions furent disproportionnées par rapport à
l’événement et les diplomates étrangers en poste en Suisse s’étonnèrent de ces
débordements. Les échanges de renseignements sélectionnés étaient des pratiques
courantes et se faisaient en même temps avec la France et l’Angleterre. La
presse a fait preuve d’un angélisme assez étrange en cette circonstance.
Pacifisme
international et antimilitarisme.
La
«Société suisse pour la paix »
était née en 1830. Sa réflexion se basait sur une longue tradition de pensée.
Il faudrait remonter à Sully sous Henri IV et sa proposition d’une
confédération d’Etats pour l’Europe, au «Traité
du droit de gens » de Grotius, à une idée de tribunal religieux selon
l’abbé de Saint-Pierre, à l’«Essai de
paix perpétuelle » de Kant (écrit en 1796). En 1889, il y a eu à Paris
l’«Union Interparlementaire » :
elle était composée des représentants des parlements d’Europe et d’autres
continents. Leur but était de substituer au droit du plus fort le droit
international. En 1891, un congrès universel de la paix s’était tenu à Rome.
Là, la décision fut prise de créer, en Suisse, un centre de cohésion des
sociétés de la paix du monde entier. Un bureau se constitua à Berne la même
année. Celui-ci fut transféré à Genève en 1924. En 1910, le «Bureau de Berne » a reçu le prix
Nobel. En 1912, la fondation Carnegie lui apporta une aide financière
considérable. Les idées pacifistes ne soulèvent pas de grands mouvements
d’opinion à l’intérieur du pays. Elles sont connues et débattues dans un milieu
assez restreint.
A
côté de ce mouvement dont l’idéalisme ne peut pas être remis en cause, il y a
de nombreuses variantes, cultivant chacune leurs particularités ou leurs
objectifs. Des mouvements hostiles à l’armée naissent pour des raisons
politiques. Les opposants à l’armée n’étaient pas toujours de paisibles
pacifistes : ils voulaient de la troupe et des armes pour la conquête du
pouvoir. Leurs écrits abondent pour attester que l’armée leur était un obstacle
qu’il convenait d’abattre. L’idéalisme de certains a été manipulé par ceux-ci.
Un groupe de Zürich accepta l’emploi des armes contre l’armée et ses
dirigeants. Quelques-uns uns essayent de prétendre qu’il s’agissait d’une
violence verbale uniquement mais les écrits sont là pour confirmer que le noyau
dirigeant voulait une révolte armée. Si celle-ci n’a pas eu lieu, c’est que le
peuple dans sa majorité n’en voulait pas et que ces mouvements se trouvaient
isolés dans les grands centres urbains.
Il
existait pourtant bien une révolte sociale dans les villes en raison de conditions
rendues difficiles par la guerre. Cette révolte n’a pas pu être récupérée par
un parti. Les grandes activités déployées par les églises protestante et
catholique expliquent cela. Leurs multiples actions dans le terrain ont eu une
influence déterminante et qui mériterait d’être mieux explorée par la recherche
historique actuelle : de nos jours signaler une action positive des
religions n’est pas apprécié des media ; ceci explique cela. Des
intellectuels apolitiques et de tous les partis se sont unis pour parler de la
détresse sociale. Nombreux sont les nouvelles, les romans à annoncer les
difficultés liées au développement des industries. Les écrivains comme
Gottfried Keller, Alexandre Cingria, Carl Spitteler, Gonzague de Reynold et
Robert de Traz ont anticipé sur l’appréciation des problèmes sociaux que les
politiques, forts en la croyance du progrès, ne voulaient pas imaginer.
A
propos de notre défense, le mouvement socialiste suisse a été tiraillé par deux
tendances : celle qui préconisait l’«Union
sacrée », c’est-à-dire qui accordait les pleins pouvoirs au Conseil
Fédéral[25],
et la minorité qui voulait une exploitation politique de la guerre et de la
crise économique. La presse socialiste ne s’opposa pas à la mobilisation. Elle
fustigeait avec vigueur la guerre : « cette
merveilleuse diversion » qui obligeait les ouvriers européens à
s’entre-tuer au lieu de marcher «à
l’assaut du capitalisme ». Lors de la votation des pleins pouvoirs
accordés au conseil fédéral, Hermann Greulich, le représentant socialiste
déclarait les accepter «dans l’espoir
qu’ils auront pour résultat non d’étendre la guerre mais d’en restreindre les
terribles effets. ».
Le
patriotisme est une valeur forte qui règne dans le pays. Le patriotisme ne
signifie pas chauvinisme, ne possède pas les aspects caricaturaux que certains
esprits, se croyant supérieurs, lui accordent. Le journal «La Gazette de Lausanne » situe cette forme de
patriotisme :
«
S’il subsiste au milieu de la tourmente
un petit peuple en qui l’indestructible volonté de vivre s’unit à la
bienveillance qui ne cède point à la contagion des frénésies meurtrières, et où
se fait entendre, malgré tout, la protestation impartiale de la conscience… ce
patriotisme-là est le nôtre. Plus il devient rare autour de nous, plus notre
rôle est d’y tenir. »
Le
canton de Berne a connu sur son sol des réunions politiques dont il ne
réalisait pas toute la portée internationale sur le moment. Lénine se montra
actif au congrès de Zimmerwald en septembre 1915 pour déclarer que la guerre est
«le produit du capitalisme ».
Une commission socialiste internationale s’était créée à Berne pour lier tous
les groupes socialistes opposés à la guerre et pour diffuser les textes adoptés
à Zimmerwald. A la conférence de Kienthal, en 1916, Lénine et Trotsky
déclarèrent que le ralliement des socialistes à un socialisme patriote était
une trahison. En même temps, ils proclamèrent la révolution prolétarienne comme
une nécessité. Les incidents de Lugano ont ainsi anticipé ce que nous allions
connaître avec la grève générale.
La
grève de 1918.
Roland
Ruffieux explicite l’année 1918 ainsi : « L’année 1918, c’est tout à la fois l’automne de la guerre, le bref été
de la révolution mondiale, le printemps de la paix et déjà l’hiver de certaines
illusions. »[26].
Lors de
plusieurs manifestations, les autorités politiques cantonales ont demandé
l’intervention de l’armée. Les milieux politiques, hostiles à l’armée,
s’emparaient du sujet : les modérés parlaient d’ingérences militaires et
les plus extrêmes proclamaient une entrée en guerre de l’armée contre le
peuple. Leurs articles de presse[27]
contiennent une violence rare qu’il ne faut pas oublier pour comprendre le
contexte psychologique dans lequel les politiques ont dû agir. Le dénuement
économique de certaines professions aurait pu être exploité en faveur d’une
tentative de révolution : que celle-ci ne se soit pas produite ne signifie
pas que la menace n’ait pas existé. Pour la majorité, l’armée ne faisait qu’un
service de maintien de l’ordre à la demande des politiques. Il n’est pas
possible de présenter dans le cadre de ce travail les différents cas de figure
ayant existé. Prenons cependant un exemple.
Lors
des incidents de Zürich au moment de la grève générale, M. Keller a demandé, au
nom de son canton et sous la pression des familles notables de la ville,
l’intervention des troupes fédérales. Pour lui donner satisfaction, le général
Wille a mobilisé des troupes d’infanterie et de cavalerie. 1917 et la Russie
marquaient les esprits et rappelaient d’autres révolutions des siècles
précédents : grèves et émeutes pouvaient avoir des conséquences pour les
autorités en place. Les politiques ne cachaient par leur frayeur lors de
l’appel à la grève générale du comité d’Olten du 7 novembre 1918. Un rapport de
forces devait s’établir et les moyens pour assurer l’ordre sont toujours
difficiles à évaluer au début de ce type de conflit. Les ordres ont été donnés
aux soldats pour qu’ils ne tirent pas. Les provocations n’ont pas manqué de la
part des manifestants : ceci est bien souvent complètement ignoré de nos
jours. L’après-midi du 8 novembre, les soldats ont tiré en l’air. Il y a eu des
blessés de part et d’autre. Un soldat fut tué d’une balle de pistolet dans le
ventre : blessure douloureuse avec une agonie lente. Des manifestants
possédaient des armes et cherchaient le conflit armé. Actuellement la
responsabilité des incidents répond toujours au cas classique de la
polémique : pour les uns, c’est l’armée, pour les autres, ce sont les
grévistes.
Le Conseil
Fédéral avait dû créer une commission de grève générale. Les troupes pour ce
genre d’intervention ont été recrutées dans les régions non-industrialisées de
Berne et Fribourg. Le 6 novembre, 8 000 hommes étaient engagés à cet
effet ; le 12 novembre 36 000 et à la fin de la grève, 90 000. A titre de
comparaison, dans la période creuse du conflit, il y avait 30 000 hommes pour
protéger les frontières.
Pourquoi un
tel déploiement de forces armées ? Pour trouver la réponse, il faut se
tourner vers l’étranger. Les dirigeants de l’Entente craignaient, plus que
Keller encore, une révolution au centre de l’Europe. Vis-à-vis des pays
voisins, les autorités politiques helvétiques devaient apporter la
démonstration de leur maîtrise de la situation. La France a elle-même apprécié
la menace comme grave et s’était tenue prête à faire intervenir des tirailleurs
algériens qu’elle stationna le 16 novembre au matin, à St. Julien-en-Genevois.
Différents documents aux Archives Fédérales laissent apparaître que les
autorités américaines elles-mêmes avaient prévu une intervention. La mission de
l’armée était d’empêcher à tout belligérant de trouver un motif d’intervention
sur notre territoire. Elle se devait d’opérer une démonstration suffisante de
force, plus en fonction du regard international que de la grève elle-même.
Il y a eu un
débat en Suisse pour savoir si la loi autorisait ce type d’intervention de
l’armée. Il paraît un peu vain car les politiques ne se sont pas posé la
question en temps de crise et lorsque les forces de police étaient dépassées
par ce type d’incidents. Il est vrai que l’armée n’était pas préparée à ce
genre de mission. Plutôt que de rechercher ce qui n’a pas fonctionné, il se
constate qu’elle a su répondre à cette demande en limitant les inconvénients
qui auraient pu se produire.
Conclusion.
La force
militaire a pu assurer une inviolabilité du territoire. Elle a eu l’effet
dissuasif escompté. Les politiques ont été vite confrontés à des difficultés
économiques aux conséquences sociales évidentes. Un déchirement réel s’est
produit lors du constat de notre dépendance économique, face aux machines de
guerre des pays belligérants. L’interventionnisme des états en guerre dans
notre souveraineté a causé un choc. Les politiques n’étaient pas prêts à cette
confrontation avec la spécificité de l’économie de guerre. La Suisse en a tiré
la conclusion utile pour le deuxième conflit mondial. Les relations entre le
pouvoir civil et le commandement militaire sont restées peu claires pendant
tout le conflit. Le politique s’était volontiers tourné vers l’armée quand la
maîtrise de la situation intérieure l’exigeait[28].
Les autorités fédérales ont eu de la peine à comprendre que l’économie, la
politique, la sécurité intérieure et la guerre formaient un tout indivisible :
ceci sera vite oublié dans les années 1930[29].
Les luttes sanglantes qui ont martyrisé l’Europe ont suscité des prises de
position manichéennes. Rester neutre est une tâche ardue, facilement considérée
comme une tache par les pays belligérants. Dans notre historiographie ou à l’étranger
et encore de nos jours, il est encore surprenant de constater le danger que
courent les neutres d’être considérés comme des vaincus.
Antoine Schülé
Ecrit en 1999
La Tourette
Contact :
antoine.schule@free.fr
[1]
Paul de Vallière : Honneur et fidélité. Histoire des suisses au service
étranger. Ed. d’art ancien. Lausanne. 1940. 774p.
[2]
Blaise Cendrars : L’homme foudroyé. Voir p. 40.
[3]
Les articles de Secrétan et de Feyler, entre autres, dans la Revue Militaire
Suisse (RMS) sont explicites à ce sujet.
[4]
Dufour (187-1875) : in Journal de Genève. 27 janvier 1861. « La
neutralité de la Confédération suisse. ». Pour un regard militaire sur la
neutralité, il faut consulter : Colonel F. Feyler : La ligue des
nations et la neutralité de la Suisse. RMS. Lausanne. 1919. 104 p..
[5]
Paul Seippel, Carl Spitteler, Gonzague de Reynold, Pierre Cérésole, Ernest
Bovet, Robert de Traz et bien d’autres…
[6]
Pierre Luciri : « Le prix de la neutralité. La diplomatie secrète de
la Suisse en 1914-1915 avec des documents d’archives inédits. » Institut
universitaire des Hautes Etudes Internationales. Genève. 1976. 336 p.. Très
utile pour une première approche et possède une bonne bibliographie.
[7]
Il serait utile de comparer les bénéfices de ces secteurs entre la Suisse et
les Etats-Unis.
[8]
Il a voulu les Etats-Unis d’Europe. Après la guerre, il a défendu l’idée que
symbolisait la Société des Nations même s’il ne croyait pas en la forme qu’elle
a prise car elle ne répondait pas « à l’attente angoissée des
peuples ». Il a osé dire à la fin de la guerre : « Si c’est une
paix des politiciens, elle s’effondrera dans un désastre sans nom. ».
Quatre ans après Versailles, il affirmait qu’une paix durable ne résulterait
pas de l’écrasement de l’une des grandes puissances : « La France et
l’Allemagne se sauveront ensemble ou périront ensemble, et nous tous avec
elles. » !
[9]
Le Conseil fédéral est en Suisse le pouvoir exécutif. Le pouvoir législatif
appartient à l’Assemblée fédérale : le Conseil National qui représente le
peuple ; le Conseil des Etats qui représente les cantons (deux députés par
canton).
[10]
Traduit en français par Office fiduciaire ou par Société fiduciaire suisse.
[11]
Il n’est pas possible de passer sous silence les procédés actuels de guerre
psychologique et économique fait à la Suisse pour la période de 39-45. Il est à
souhaiter qu’un Américain, bien intentionné dans une guerre économique très
profitable mais sous le couvert de « la
défense de droits humains imprescriptibles », ne juge pas utile
d’exploiter une situation de 14-18 et il y aura assez d’hypocrites pour les
louer...
[12]
L’histoire est une création continue… Les faits sont là et ensuite les
éclairages changent…Suivant l’éclairage, vous êtes soit un révisionniste, soit
un « phare éclairant les peuples »…
[13] Consulter : Peter Alemann :
« Die Schweiz und die Verletzung der belgischen Neutralität im Weltkrieg
1914. Buenos Aires. 1940. 145 p.. Ce résumé de doctorat en philosophie
est écrit en allemand. La relation Suisse alémanique et Allemagne est bien
exposée. Son étude récuse certains clichés qui prédominent encore.
[14]
Par son épouse.
[15]
Nicolas Meienberg : Le délire général. L’armée suisse sous influence. Ed.
Zoé. Genève. 1988. 216 p.. Nourrissant une profonde aversion pour Wille,
l’auteur livre un combat politique sous le couvert de faire de l’histoire à la
façon d’un journaliste qui veut rendre l’anecdote sensationnelle. Il ne
supporte pas que Wille n’ait pas été issu d’une famille pauvre et d’un quartier
ouvrier : ceci est la base de son esprit qui se veut critique. Il est heureusement
possible de faire de l’histoire sans cultiver la haine…
[16]
La liberté de la presse est toujours un sujet prisé mais, par contre, rares
sont les études pour la grand publique sur les financements de cette même
presse et sur les appartenances politiques des journalistes les plus en vue.
C’est, sans doute, un sujet tabou au nom de ce fameux principe de
l’indépendance de la presse.
[17] Gustav Adolf Lang : Die Kontroverse
um Kriegsursachen und Friedenmöglichkeiten 1914-1919 im Rahmen der « Neuen
Zürcher Zeitung ». Zürich. 1968.268 p.. Son étude serait un modèle
utile pour une analyse globale de la presse helvétique.
[18]
M. Stek par exemple.
[19]
Par ce terme, tout devait s’expliquer mais souvent il a caché les nuances
essentielles et composites de chacune de nos cultures.
[20]
L’armée se constituait de 6 divisions, fortes de 20 000 à 25 000 hommes. Elle
comprenait au total 36 régiments d’Elite et de Landwehr, 257 bataillons
d’infanterie, 4 brigades de cavalerie, 80 escadrons montés, 14 unités de
cyclistes, 105 batteries d’artillerie et de troupes de forteresse, des
bataillons d’étape, des formations sanitaires ainsi que des unités techniques.
[21]La
création des automatismes chez un soldat est bonne uniquement lorsque ces
automatismes sont justifiés par les nécessités du combat.
[22]
Elite : hommes de la classe d’âges 20-32 ans.
[23]
Landwehr : hommes de la classe d’âges 33-40 ans. La Landsturm représente
les 41-48 ans avec les non aptes de l’Elite et de la Landwehr.
[24]
L'équivalent du Ministère de la défense en France.
[25]
En cas de guerre, le Conseil fédéral possède des pouvoirs extraordinaires que
lui accorde l’Assemblée fédérale : il peut prendre ainsi des mesures qui
peuvent déroger à la constitution ou au droit. A ce sujet, lire : Jacques
Bühler, «Le droit d’exception de l’Etat. Etude des droits publics allemand et
suisse de 1871 à nos jours. Tolochenaz. 1994. 271 p..
[26]
Roland Ruffieux : La Suisse de l’entre-deux guerres. Payot. Lausanne.
1974. p.49.
[27]
Prendre les journaux comme la Tagwacht de Berne, le Volksrecht ou la Jugend de
Zürich, le Vorwärts de Bâle ou la Sentinelle de La Chaux de Fonds.
[28]
…et l’oubliait une fois le danger passé, surtout au moment où il convenait
d’écrire l’histoire, c’est-à-dire une histoire convenable selon les sentiments
du moment…
[29]
L’histoire enseigne à celles et ceux qui veulent la lire avec intelligence ,
pas aux personnes qui l’ignorent…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire